Patient, du latin "patiens", littéralement celui qui subit. Si c’était vrai dans l’ancien modèle de santé où le patient se pliait aux décisions du médecin selon un modèle paternaliste, c’est, heureusement d’ailleurs, de moins en moins le cas. La démocratie ne s’arrête pas aux portes de l’hôpital. C’est ce qu’ont compris déjà plusieurs pays, le Canada en tête avec son approche « patients as partners ». Le monde occidental connaît une transition épidémiologique : moins de crises aigües (hors cas exceptionnel de Covid) et de plus en plus de maladies chroniques (dont le cancer reconnu comme tel par l’OMS). En conséquence, les malades doivent apprendre à vivre avec leur état de santé et à gérer celui-ci pour garder une qualité de vie. Et qui parle le mieux son état de santé sinon le patient concerné lui-même ? Pour une vrai démocratie sanitaire, explorons ce que peut nous apporter ce nouveau modèle.

Aujourd’hui, les maladies chroniques font malheureusement partie du quotidien de millions de personnes. A l’ère d’Internet, les patients tentent de plus en plus de s’informer par tous les moyens, avec les dérives de Dr Google que l’on peut imaginer. Néanmoins, il serait contre-productif de la part du monde médical de faire la politique de l’autruche et de nier cette évidence.

Les choses ont commencé à changer avec l’épidémie du Sida dans les années ’80-’90. Les malades se sont organisés pour s’informer et militer pour un meilleur accès aux traitements (je conseille à ce sujet le très beau film 120 battements par minute).  On commence alors à parler du patient empowerment. On pourrait traduire cela par autonomisation, mais ce n’est pas rendre hommage à ce mot anglais qui porte en lui la notion de power, pouvoir !

On peut poser la question en termes très simples, qui comprend mieux une personne atteinte d’un type de cancer x qu’une autre personne atteinte du même cancer ? Transformer son expérience personnelle en savoirs transmissibles, voilà ce qu’être patient expert signifie. C’est utile pour les autres patients, mais aussi pour le personnel soignant et pour les décideurs politiques. Mieux comprendre les besoins spécifiques d’une personne avec une maladie chronique permet de réduire les coûts des soins de santé, mais surtout, et c’est capital, d’améliorer la qualité de vie. Et puisqu’un exemple concret vaut souvent mieux qu’un long discours, voici le résultat d’une étude sur l’asthme publié sur le site educationpatient.be :

GODDING V. ( Minerva, janvier 2005 Vol 4 N°1 ) analyse l'impact des programmes d'éducation pour enfants et adolescents asthmatiques à travers une étude de la littérature. L'auteur retient comme bases de données la Cochrane Airways Group, PsychINFO, ainsi que les références citées dans les études analysées. Elle retient les études contrôlées randomisées ou les essais cliniques contrôlés publiés, comportant une évaluation d'évolution de l'asthme. Parmi les effets positifs, on relève :

• une amélioration des paramètres fonctionnels respiratoires

• une diminution de l'absentéisme scolaire,

• une diminution du nombre de nuits perturbées par l'asthme,

• une diminution de jours d'activité restreinte,

• une diminution d'admissions en urgence.

L'auteur conclut à l'efficacité des programmes d'éducation sur le plan de la fonction respiratoire, de la perception d'un meilleur auto-contrôle, sur le plan social et celui de la consommation de soins de santé.

Evidemment si chacun est expert de sa propre condition, cela ne fait pas de tous les patients des patients-experts! En France, l'Université des patients forme ces futurs professionnels de la santé d'un genre nouveau. 

Je vous invite à lire de toute urgence l'excellent article de Mélodie Fortier : 
Le “patient-expert” devient-il un nouvel acteur clé de notre système de Santé ?

Pour en savoir plus sur l'Université des Patients Paris Sorbonne