Le cancer, entre autre, nous laisse souvent avec des cicatrices invisibles. 80% des handicaps le sont. La fatigue, la diminution des capacités cognitives, les douleurs chroniques... sont autant d'effets secondaires de la maladie qui ne se voient pas. Mais être invisibles ne les rend pas moins réels. Avec une communication saine sur le sujet entre la personne qui les vit et son employeur, des aménagements raisonnables peuvent, non DOIVENT, être mis en place pour le bénéfice des deux parties. Une adaptation nécessaire, souligne Hélène Bonnet, de Sanofi dans un article du Monde : « Près d’une personne sur deux touchées par un cancer souffre encore d’une fatigue cliniquement significative, cinq ans après le diagnostic de sa maladie, selon l’étude VICAN5 de l’Institut national du cancer. »
Dans ma newsletter #2 sur le disability management (à relire dans son entièreté ici), je rappelais à propos des aménagements raisonnables le rôle clé du médecin du travail. Mais il est bien entendu possible d'en implémenter sur base des échanges et besoins du travailleur et de son employeur de bonne foi. Il est vrai que souvent l'employeur préfère avoir le label "validité médicale" du médecin du travail.
Combien de fois n’ai-je pas entendu un(e) de mes coaché(e) me dire avoir rencontré le médecin du travail la veille de son retour ou dans les jours qui suivaient son retour. Or à ce moment-là, le retour est déjà effectif, sans aménagements et avec le risque de « se prendre un mur ». Car mal préparé, le retour peut s’avérer catastrophique : effets secondaires de la maladie non pris en compte (ce qui arrive beaucoup en cas de retour après un cancer), communication désastreuse (un travailleur même pas accueilli) ou encore perte de confiance en soi et baisse de l’estime de soi face aux difficultés rencontrées qui mènent à un état dépressif et autre absence en conséquence.
Le médecin du travail, dans le cadre de l’évaluation des capacités du travailleur, pourra faire appel à différentes expertises complémentaires, avec l'accord du travailleur. L’objectif est de s’assurer que le travail sera adapté au potentiel du travailleur. N’oublions pas qu’un retour ne doit pas nécessairement équivaloir à la situation avant la maladie. Il peut y avoir des étapes, des aménagements nécessaires. Pour cela, il est important évidemment de connaître le profil de fonction, l’état de santé actuel (et évolution possible) de la personne qui revient et les possibilités de travail adapté dans l’entreprise.
Dans un article paru en mars 2022 de François Desnoyers, le quotidien français Le Monde parlait des ces employeurs inclusifs qui prenaient des dispositions concrètes pour sensibiliser et intégrer le handicap invisible, pour une meilleure qualité de vie au travail :
"Ces entreprises qui regardent les handicaps invisibles en face"
Extraits :
Nombre de salariés souffrent de pathologies invisibles, mais qui ont des répercussions sur leur vie professionnelle. Elles représentent 80 % de l’ensemble des handicaps. Maux de dos, diabète, cancer, dépression sévère, schizophrénie, déficience visuelle, surdité, dyslexie… compliquent le quotidien des collaborateurs et enrayent la bonne exécution de leurs missions. Des aménagements sur le lieu de travail peuvent toutefois compenser les difficultés rencontrées. Indispensables au maintien dans l’emploi, certaines de ces adaptations sont d’ailleurs imposées par la loi depuis 2005. Les employeurs ont ainsi l’obligation de réaliser pour chaque travailleur handicapé un « aménagement raisonnable », c’est-à-dire ne représentant pas une charge trop importante.
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La gestion de ces problèmes de santé a longtemps fait figure de parent pauvre des politiques handicap des entreprises. Méconnus des encadrants, souvent passés sous silence par les personnes concernées elles-mêmes, ils étaient peu ou pas pris en compte par les organisations.
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Encourager la libération de la parole est également important. Dans les entreprises de plus de 250 salariés, le référent handicap – dont la présence est une obligation légale – peut jouer le rôle de « tiers de confiance », informant et accompagnant les personnes concernées. D’autres outils permettent de favoriser les échanges. En 2018, Sanofi a lancé le programme Cancer & travail : agir ensemble. Une trentaine d’antennes rassemblant des équipes pluridisciplinaires (ressources humaines, santé au travail, salariés touchés par la maladie…) ont vu le jour sur les sites français de l’entreprise. « Elles regroupent environ 150 personnes formées à l’écoute active », explique Hélène Bonnet, responsable du projet. Celles-ci informent les collaborateurs qu’il existe un lieu où ils peuvent évoquer leurs problèmes et leurs besoins. « Nos actions ont progressivement infusé au sein de l’entreprise, se félicite aujourd’hui Frédérique Granado, directrice engagement sociétal de Sanofi France. Désormais, des manageurs et leurs équipes nous demandent eux aussi de les accompagner. »
Faire évoluer les horaires de travail peut s’avérer une solution quand, par exemple, une équipe compte un salarié diabétique qui doit manger à heure fixe. « Avec l’accord du collaborateur et de son supérieur, nous communiquons en amont auprès des équipes afin qu’elles ne s’étonnent pas de le voir quitter une réunion qui dépasserait sur l’heure du déjeuner », explique Adélia Pereira, responsable des ressources humaines et référente handicap chez Generali.
Le maintien dans l’emploi peut enfin passer par une remise à plat de la charge de travail, voire de la nature des missions confiées. C’est ce que certaines entreprises proposent, par exemple, à des salariés en rémission après un cancer. Une adaptation nécessaire, souligne Hélène Bonnet, de Sanofi : « Près d’une personne sur deux touchées par un cancer souffre encore d’une fatigue cliniquement significative, cinq ans après le diagnostic de sa maladie, selon l’étude VICAN5 de l’Institut national du cancer. »
Cadre dans une multinationale, Marie a été touchée par la maladie en 2017. Après plusieurs mois de traitement, elle est revenue au bureau, en mi-temps thérapeutique la première année, puis aux 4/5e jusqu’à aujourd’hui. « Le groupe a fait appel à une consultante qui a écouté mes attentes et a échangé avec mon manageur et mon équipe. » Elle s’est vu confier des tâches peu stressantes, loin de l’intensité de ses précédentes missions au service achats. « Je me suis sentie protégée durant cette période transitoire », explique-t-elle. Des aménagements bénéfiques pour Marie, qui a pu préserver sa santé, mais aussi pour l’entreprise, qui a ainsi réussi la réintégration d’un de ses membres dans le collectif de travail.
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